-Ambassadrice ! Je vous salue.
-Je vous salue Princeps, qu'attendez-vous de moi ?
-Aujourd'hui, le Sénat s'est mis d'accord pour les élections et pour certaines mesures à prendre. Aussi, vous confie-t-il la mission d'envoyer un rapport corrigé de la situation sur le réseau de la Station Diplomatique Centrale afin que tous soient mis au goût du jour.
-Bien, mais qui doit le corriger ?
-Vous.
-Mais...
-Cette mission ne sera accomplie que si la correction est faite, il est certain que les autorités compétentes de Serena ont omis de définir les termes propres à notre Etat. De fait acceptez-vous de remplir cette mission ?
-Je m'y engage, soyez-en assuré.
-Parfait, vous recevrez sous peu la visite d'un postier officiel qui vous délivrera le dossier. Ne l'inscrivez sur le réseau que lorsque vous aurez la version définitive. C'est une question de...
-Paranoïa politique. lança l'ambassadrice avec cynisme.
-Cessez votre sarcasme, quant à notre République. Vous vous adressez au second de la RPSS, témoignez-lui du respect en ne critiquant pas sa patrie qui est aussi la vôtre !
-Bien Septimus. elle se ressaisit face au Princeps, le tout avec une arrière pensée digne des grands révolutionnaires.
-Sur ce, je vous laisse, votre tâche est longue et peut être dangereuse. Au revoir.
L'hologramme disparut. Asilia savait ce qu'elle devrait faire, cependant elle restait stupéfaite qu'un ordre aussi important lui fut donné maintenant. Durant la conversation, elle avait reçu un message de son prédécesseur, Braetus. Elle lut :
Braetus a écrit:« A l'attention de Madame l'Ambassadrice Asilia, rattachée à la SDC.
Cher Madame,J'ai appris suite à la dernière session sénatoriale que vous serez chargée d'envoyer mais surtout de « corriger » le rapport des événements. Cela prouve que le Sénat a confiance en vous, soyez en ravie. Aussi, c'est pourquoi je vous envoie ce message. Cet ordre, comme vous l'aurez compris permettra au contre-espionnage serenaéen d'avoir l'esprit tranquille et le sommeil lourd. Néanmoins, j'espère que vous ne serez pas si bête de suivre les directives à la lettre, sinon quoi, vous auriez raté votre examen de prise de fonction. Je suis certain que vous savez tout de moi et vous n'ignorez donc pas le véritable but de cette missive. Veillez à éclairer l'obscurité, et à ne pas obscurcir ce qui est éclairé. Faites moi confiance et ayez-en pour lui, ce n'est pas un despote. Valorisez le travail et la sagesse plutôt que de satisfaire l'orgueil et l'oisiveté. Et si vous doutez, demandez-vous : Qui dois-je croire ? Un frère de métier dont je suis les pas assise dans ce fauteuil ? Ou un homme vaniteux trop conservateur et trop fier ?
Sincèrement,
Braetus.
Lettre 3997 de l'autobiographie épistolaire « Les quatre mille lettres vie », Braetus, section « Dernières lettres et adieux ».
Elle était bouleversée par l’œuvre de l'ex-ambassadeur, qui sûrement connaissait que sa fin approchait. Ce message était, pour elle, un message d'espoir. Braetus savait, elle n'en doutait pas, mais elle aussi aurait su le moment venu.
Le postier arriva et déposa le rapport et les formulaires de censure avec la liste des modifications apportées. Elle commença sa correction, en suivant les conseils du vieil homme, par respect pour l'art diplomatique et pour le plaisir des sciences historiques. Aussi, après une vingtaine d'heures de travail sans interruption elle s'apprêtait à publier son œuvre, mais le Sénat lui demanda de retarder d'une journée la publication pour des raisons politiques voire logiques. Elle publia :
Ambassadrice Asilia de la RPSS a écrit:« Année 16.469 Ambassade de Serena
Rapport semi-historique officiel
« De la fin d'une vie »
L'année TSU 16.415 marque un tournant dans l'Histoire de Serena et justifie une certaine absence des services diplomatiques dans Aelden.Alors que la situation de la Res Publica s'améliore peu à peu, la Ligue de la Force Républicaine (LFR) commence à fortement peser dans les décisions sénatoriales. Quelques années après les Grandes Célébrations du millénaire de l'Amirauté Solarienne, alors que la Fédération Thélios choit dans l'impuissance et que commence à se former l'Académie des Sciences Fédérales, deux familles importantes déclarent le mariage de deux des membres de leur progéniture. Une des familles est de la ligue, l'autre, jouit d'une situation très opulente et contrôle quasiment un des sénats coloniaux. La loi serenaéenne proscrit les mariages arrangés pour une quelconque hégémonie. C'est pour cela que Routhos se lance dans un pseudo-conflit contre cette union jugée dangereuse. Après de nombreuses procédures où le Sénat s'est fermement opposé à l'auteur de ces demandes, le mariage est reporté de quelques années. Le Princeps Maximus ne souhaitant pas en rester là, programme une réunion sénatoriale obligatoire le jour et à l'heure de la cérémonie d'alliance. Au cours de celle-ci, devait être votées des réformes sur les conditions de mariage et sur la militarisation avancée de Serena. Durant cette période, la Ligue acquiert une grande notoriété et charge des mercenaires de terroriser les sénateurs plébéiens dits hostiles. Face à la menace croissante, Ferox décide de se renseigner. Il préviendra Routhos, deux ans avant de mourir, que la LRF souhaite tenter un coup d'état lors de la session obligatoire. De ce fait, dès l'ouverture de la séance, les membres de la Ligue, font entrer une armée de mercenaires armés pour soumettre les sénateurs. L'intervention des Stirpatores fut rapide et une « bataille » commença. Le Princeps Maximus compte parmi les combattants. A l'issu du combat, où les gardes officiels sont victorieux, le Princeps Cethegus fait enfermer les Sénateurs de la LRF. On dénombre soixante dix-sept mercenaires morts, ce qui correspond au nombre d'engagés. Il y a quinze gardes tués ou grièvement blessés, une dizaine de sénateurs tués dont le quart appartenait aux rebelles. Malgré sa vaillance et son courage lors du combat, le Princeps Maximus s'effondre suite à trois tirs à énergie. Il est déclaré assassiné par et pour la patrie. Cethegus obtient tous les pleins pouvoirs temporaires et ôte aux auteurs de la tuerie leurs charges et responsabilités.
Des élections sénatoriales ont lieu. Sept ans sont nécessaires pour remplir les places vides au Sénat. Au bout de cette période, Serena s'éclipse de la scène galactique pour éviter les pressions extérieures afin d'élire le nouveau Princeps Maximus.Chaque colonie crée, par le biais du suffrage universel, une liste de candidats potentiels. Puis chaque Sénat colonial choisit un certain nombre de candidat(e)s parmi la liste et proportionnellement à l'importance de ladite colonie. Les candidats coloniaux sont ainsi rassemblés et envoyés sur Serena où le même type d'élections a lieu à l'exception de la nomination sénatoriale. Puis les sénateurs nomment le nouveau Princeps Maximus en fonction d'un certain nombre de critères. Il faut quatre-vingt cinq pour cent des voix pour que la charge soit attribuée. La durée de nomination est cependant allongée en raison de l'élection du nouveau Princeps. Septimus est élu.
Il y a quelques jours, le nouveau Princeps Maximus est nommé, il s'agit d'un ressortissant de la colonie Iuvenia répondant au nom de Plinius Quinctius Sthénius. Sa première action en tant que Tout Premier de l'Etat a été de dissoudre la Ligue de la Force Républicaine pour trahison et d'envoyer tous les ex-sénateurs responsables du massacre et leurs complices devant le Tribunal Suprême. Le procès individuel est encore d'actualité. Parmi les juges on peut citer Ostia qui malgré sa proximité avec le défunt a pu obtenir cette place dans ce procès historique. En effet, le rôle du Tribunal Suprême se distingue des autres instances juridiques de la Res Publica, celui-ci traite tout particulièrement des crimes jugés graves par la loi de Serena. Seul le Sénat et/ou le Princeps Maximus peuvent y envoyer des serenaéens. Les sentences prononcées sont souvent assez extrêmes bien que la peine de mort soit abolie.
Liste des très grandes personnalités jugées pour haute trahison :
Ex-Sénatrice, ex-Ductrix Magna et ex-Directrice de l'Institut publique de formation à la recherche préventive extra-serenaéenne, Messilia : reconnue coupable d'assassinat de Routhos. Peine : Enfermement à la Mentum Vincula *, euthanasie volontaire en l'an TSU 16.448
Ancien Sénateur fondateur de la LFR, Frangans : jugé coupable avec aveux d'assassinat du Princeps Maximus Routhos. Peine : enfermement dans la Mentum Vincula*. Euthanasie forcée prévue dans quelques jours.
Ex-Sénatrice et ex-Ductrix Magna Arnix : reconnue coupable sans aveux d'assassinat du Princeps Maximus Routhos. Peine : Enfermement à la Mentum Vincula*, euthanasie volontaire prévue en l'an TSU 16.445.
Ex-Sénateur, ancien Diplomate général et responsable aux affaires étrangères de la Ligue, Asilius : reconnu coupable de participation active à un coup d'Etat avec aveux. Peine : Enfermement dans la Mentum Vincula*.
Ex-Sénateur et Ambassadeur sur Thélios, Triocala : jugé coupable de crime contre la Res Publica avec aveux. Peine : Exil en Dareyn.
Ex-Sénateur Spectator : jugé coupable avec aveux. Peine : exil dans un centre d'études de Serena en Dareyn.
Ajout de dernière minute :
Sénateur et Princeps Septimus, co-fondateur officieux de la Ligue de la Force Républicaine : jugé coupable, sans aveux de crime contre la Res Publica pour avoir été commanditaire du meurtre de l'ancien Princeps Ferox, et pour avoir tenter d'assassiner le Princeps Maximus Routhos ainsi que pour tentative de réformer Serena de manière contraire à son développement. Peine : Mentum Vincula* et euthanasie forcée en cours de votation.
Les funérailles de Routhos se dérouleront dans deux ans TSU, suivie d'une période de deuil d'une durée de trois ans TSU sous la responsabilité de Sthénius.
Un mausolée a été érigé à son effigie au centre d'un cercle passant par l'Ambassade Fédérale Thélios, le Sénat, le monument de la Haute Assemblée militaire et l'Académie (des Sciences). La Res Publica peut maintenant revenir sous le commandement de son nouveau Princeps Maximus Sthénius, qui est désormais le premier Princeps Maximus issu d'une colonie et le second Princeps Maximus de la Res Publica Senatoria Serenae.
*Mentum Vincula (Prison des esprits) : Asile spécial, où les condamnés subissent un lavage de cerveau durant lequel on ne garde que les traces des crimes qui les ont amenés. Une forme de démence envahit progressivement les condamnés à l'état de légumes qui finissent par demander l'euthanasie. Dans les cas de démences graves, l'euthanasie est pratiquée de force afin d'éviter que les condamnés ne souffrent.
Ce rapport a été relu et modifié dans sa forme finale par l'Ambassadrice Asilia. »
