Irae sombra-t-elle ?

- Monsieur, nous avons la confirmation de la reddition complète et inconditionnelle des dernières forces républicaines à Pluspuolen. Il s'agissait de la dernière poche d'obscurantisme, je suis fier de vous annoncer que la planète est tout entière dominée par la Science !
- Parfait. Quant à ces ignorants, je pense que quelques années dans un Centre d'Enrichissement leur seront des plus profitables. Il n'est que grand temps de remettre tous ces pauvres hères dans le droit chemin du Progrès !
- Cela sera fait, Monsieur.
- Je l'espère.

Tandis que son subordonné sortait de la salle, l'Homme fit pivoter son fauteuil, pour se retrouver face à une console holographique. Les lumières décrurent, et l'image de la planète apparu. Bien qu'elle fût majoritairement recouverte par une œcuménopole, ses calottes glaciaires brillaient dans la lumière de son étoile, brillaient d'un éclat blanc qui lui avait valu son nom : Valkoinen Aurinko, le Soleil Blanc. L'affichage dézooma jusqu'à afficher une petite portion de la Galaxie. Valkoinen Aurinko n'était désormais plus qu'un petit point, que l'ordinateur surlignait en vert. Quatre autres planètes étaient également relevées d'un point vert, tandis que toutes les autres que présentaient le graphique étaient indiquée par des nuances de rouge.

L'homme tapa quelques commandes rapides sur son clavier, et une voix synthétique répondit à sa requête.

- Authentification nécessaire.
- Rufus S. Petollinen. Identification Lima-India-Sierra-Un-Un-Trois-Alpha-Roméo-India-Oscar-Un-Deux.
- Identité confirmée.

L'affichage changea, de sorte à englober l'entièreté du bureau, et montra une salle de réunion.

***

Au même moment, à plusieurs dizaines d'années-lumière de là, à bord de l'Axiome, croiseur amiral de l'Ordre Progressiste, se trouvait la salle de réunion en question. Plusieurs personnes étaient déjà assises autour de la table, certaines n'étant présentes qu'au travers d'hologrammes, comme dans le cas du Vice-Directeur Petollinen.

Une femme prit la parole. Il s'agissait de Kirsikka M. Rauha, Directrice de l'Ordre.

- Bonjour à tous. Comme vient de nous en informer le Commodore Ilanko, nous avons éliminé toute menace sur Valkoinen Aurinko, Vanha, Satama, Sydan et Suoja. Les autres mondes Iraéens sont trop infestés par la vermine pour la poursuite de nos opérations.
- Néanmoins, intervint un des participants, nous ne pouvons nous arrêter à cinq planètes. Des milliards de citoyens pataugent encore dans la fange glaireuse de leur crasse ignorance. Il est de notre devoir de les sauver, et de leur apporter le flambeau bienveillant de la Science, qu'ils le veuillent ou non !
- Exactement. Mais cela ne peut se faire sans soutien. Commodore ?
- Nos informations montrent que trois autres factions cherchent à imposer leur domination sur les planètes Iraéennes. Outre le Conservatoire en lui-même, et ces chiens de républicains, il nous faudra aussi compter sur la Corpocratie.
- Du libéralisme... Quelle honte. Ne savent-ils donc pas que seuls l'Empirisme et la Raison permettent de guider le peuple efficacement ?
- Hélas... Et ce n'est pas le pire.
- Oh.
- En effet. Nos sondes ont détecté de forts mouvements de flottes. Nous devons d'urgence armer des vaisseaux, au risque de voir réduit à néant tous nos efforts.
- Qu'en pense le Conseil ?

Chacune des personnes présente autour de la table, physiquement ou non, leva la main.

- Motion adoptée à l'unanimité, la création d'une Flotte Progressiste. Que les Gouverneurs coloniaux soient prévenus, et que tous les chantiers soient ravitaillés. Nous devons produire pour défendre la Science !
- Heureusement, nos forces ont réussi à mettre la main sur un certain nombre de vaisseaux Iraéens, sans compter ceux confisqués aux républicains, et ceux se trouvant en cale sèche autour des mondes contrôlés.
- Quel effectif ?
- Plusieurs centaines de croiseurs de classe Raivo, deux milliers de destroyers Kynsia, le même nombre de frégates d'interception, un grand nombre d'escadres d’Aigles, et surtout, neuf croiseurs lourds dérivés des Claymores, de plusieurs plans différents. Cinq optimisés pour combattre les croiseurs, et quatre plus polyvalents. Plus un croiseur lourd anti-croiseurs de classe Altystheis.
- Sans oublier, bien entendu, le cuirassé à bord duquel nous nous trouvons.
- L'Axiome, classe Nassau. Effectivement.
- Pour revenir à cet embryon de flotte, je pense qu'il faut également entamer une grande campagne de renommage. Leurs noms actuels sont bien trop évocateurs des erreurs de l'Ancien Régime. Tenez, le Rohkea, ça fait pas sérieux !
- En effet. Tous en faveur ?

Une nouvelle fois, toutes les personnes présentes levèrent la main.

- Parfait. Renommez tous les vaisseaux, de sorte à ce que la Flotte devienne une Ode à la gloire de la Science !
- A vos ordres, Madame.

***

Trois semaines plus tard, le temps de renommer tous les vaisseaux et d'organiser la Flotte correctement, la salle de réunion de l'Axiome était occupée. Toutefois, les seules personnes présentent étaient en uniforme, et étaient au moins Contre-Amiral dans la hiérarchie de la jeune Force Progressiste. Le Commodore Ilanko prit la parole.

- Bonjour à tous. Si vous êtes réunis ici aujourd'hui, c'est pour vous voir confier vos affectations. Les vaisseaux que nous possédons actuellement ont été séparés en dix groupes de combat, comportant chacun quarante-cinq croiseurs de classe Raivo ; deux cent destroyers de classe Kynsia ; deux cent frégates de classe Rapière ; trente escadres d’Aigles, pour un total de soixante mille unités, et un croiseur lourd. Le cuirassé Axiome n'est attribué à aucun groupe de combat, et restera en orbite autour de Valkoinen Aurinko. Quant aux affections...

Il ouvrit le porte-document qu'il avait amené avec lui.

- Première Flotte, Amiral Alnor S. Kimo. Vaisseau amiral : l'Intégral.
Deuxième Flotte, Amiral Arys L. Sinki. Vaisseau amiral : le Récurrence.
Troisième Flotte, Amirale Helen H. Haguen. Vaisseau amiral : le Lemme.
Quatrième Flotte, Amiral Aphel D. Valekoren. Vaisseau amiral : le Quantum.
Cinquième Flotte, Amirale Susan B. Luchenko. Vaisseau amiral : le Quark.
Sixième Flotte, Amiral Sauli F. Niinistö. Vaisseau amiral : le Théorème.
Septième Flotte, Amiral Jyrki V. Katainen. Vaisseau amiral : l'Entropie.
Huitième Flotte, Amirale Mari W. Kiviniemi. Vaisseau amiral : l'Empirique.
Neuvième Flotte, Amiral Paavo R. Lipponen. Vaisseau amiral : le Vecteur.
Et enfin, Dixième Flotte, Amirale Anneli G. Jäätteenmäki. Vaisseau amiral : le Scalaire.
Les première et deuxième flottes resteront en défense de Satama. Les trois, quatre, cinq, six, sept, huit, neuf et dixième flottes seront stationnées sur Valkoinen Aurinko.
Vous pouvez disposer.

Coalition Corporatiste

Déjà quelques années que Sininen Taivas s'est officiellement séparée de la férule directe d'Irae et du Conservatoire, dans les buts évoqués dans notre précédant journal. Entretemps, Sininen Tiavas s'est proposé de cogérer avec le Conservatoire quatre autres planètes: Solaris, Séléné, Renaissance Minor et Talvi.
L'efficacité de la naissante Corpocratie a été démontré dans cette mission, durant laquelle elle a réussi à préserver de la menace républicaine et des attentats pseudo-scientifiques de l'Ordre Progressiste, nouvelle institution fortement hostile et totalitaire. Le Conservatoire a donc accordé à la Corpocratie le droit de régence sur ces mondes, lui permettant de se soulager d'importantes surcharges. Un pacte entre la Corpocratie et le Conservatoire a hier été signé par le représentant du Conservatoire et Lucius Idego, représentant de nos intérêts, assurant l'efficacité des ravitaillements, la reconnaissance de la Corpocratie, renouvelant l'alliance Irae-Sininen Taivas, et permettant le déploiement d'une force armée conséquente pour soutenir le Conservatoire. Dans cette optique, des droits de passages ont été signés entre le Conservatoire et la Corpocratie, afin d'éviter les litiges militaires.

Les forces armées, conçues par l'Artemis Group et ses filiales, ont d'ors et déjà été déployées en nombre conséquent:
Trois flottes de soixante croiseurs Glaives et près de huit cents corvettes sabres suivis d'une division de quarante mille Éperviers, appuyés par deux Claymores ont été déployées sur Talvi. L'identique a été déployé sur Sininen Taivas, avec des renforts de trois Claymores supplémentaires et six milles Éperviers, ainsi qu'un Palatin, afin de protéger la Capitale.
Quatre flottes de quatre-vingt cinq Glaives et deux cents Rapières, appuyées d'un Palatin chacune et d'escadres importantes de Busards ont été déployées sur Solaris, dernière enclave Corporatiste contre la menace terroriste incarnée par le soi-disant Ordre Progressiste. Nul doute que les traîtres ont pris peur, car Solaris n'a jamais été si peu attaquée par leurs vaisseaux pirates.

Le Financier, 37 Stelahn de l'an 15.849 TSU

La foule se mit soudain à applaudir chaleureusement, l'hystérie et la joie emportant tout un chacun. Les femmes embrassèrent leurs enfants, les pères, heureux, s'étreignirent avec toute la virilité dont ils étaient capables.
Ce jour resterait dans les annales, la République fut enfin établie sur Aurora. Sur la douce aire de l'hymne républicaine, le Président apparu enfin. Sa jeunesse laissant à peine filtrer l'immense sagesse dont il était pourvu, notre jeune Président déclama un discours enflammé, plein de sincérité.

Enfin, il ordonna de mettre à terre l'immense monument représentatif de l'ancien régime du Conservatoire, qui gisait au milieu de la gigantesque place. Les drapeaux de la République furent hissés, car aujourd'hui, une nouvelle ère gagna Aurora.

Mais ce n'était pas la seule. Bien que désignée comme étant la nouvelle capitale de la République, plusieurs colonies à proximité tombèrent elles aussi au moins des républicains : Alpha, Imperia, Yhtio et Altaia.

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" Hé l'jeunot, magne toi de m'ramener ce que je t'ai d'mandé ! "

Jeune et motivé, il s'engagea, mais il était surtout ignorant et naïf. Du talent, il en avait, cela ne faisait aucun doute, mais s'il était taillé pour ce job, ça se saurait. Car maintenant qu'il était engagé, s'attendant à de nombreux monts et merveilles, il était déçu.
Traité comme un moins que rien par ses ainés, mais aussi par ses semblables qui avaient fait de prestigieuses écoles, sa procédure était bien moins singulière.

Brillant, il l'était, car la Science avait longtemps été sa compagne. Mais le destin en voulu autrement, et c'est finalement vers la politique qu'il s'orienta, pour des raisons qu'il ignorait.

Passant ses journées à servir de sous-fifre, ayant perdu tout son amour propre, sa motivation commençant à s'émousser, l'impensable se produisit.

Alors que notre jeune ami accomplissait une autre des tâches ingrates à laquelle il fut, comme à son habitude, assigné, il fit la rencontre d'un curieux personnage.

" Les vents changeront, la fougue de la jeunesse vaincra la sénilité installée. Fais moi confiance et crois en toi, car tu en as le potentiel. Laisse moi t'aider. "

Alors qu'il se tournait vers l'inconnu qui lui parlait, il ne trouva rien d'autre qu'un vieux livre poussiéreux aux pages jaunies. Un immense volume qui devait avoir pas mal d'année à son actif.

" Pour le moment je serais ombre, mais je ne serais jamais loin. Ne parle de cela à personne, et étudie, car il te sera d'une grande aide. "

" D'une grande aide… Vous plaisantez, c'est marqué "Les 100 meilleures histoires de Père Castor", qu'est-ce que je vais donc pouvoir faire de ça ? C'est une plaisanterie, on se joue encore de moi ?! "

L'ombre disparut.

Il s'en alla, sans s'encombrer de ce fantasque livre. Il imaginait déjà les rires de ses "collègues" qui s'étaient résolument joués de lui.

La journée enfin terminée, il retrouvé son petit logement presque douillé. Sa paye de misère ne lui permettait pas de s'offrir les somptueux appartements réservés à la haute caste politique. Pensant en avoir fini avec cette journée maudite, il trouva le fameux livre. Jamais ils n'étaient allés aussi loin pour une farce…

Il s'attendait à quelque chose, mais rien ne se produisit, hormis l'étrange ombre qui ceinturait l'ouvrage ancien. C'est alors qu'il repensa aux paroles du mystérieux personnage qui parlait lui aussi d'ombre.

Décidé de tirer tout cela au clair, quitte à se faire ridiculiser une nouvelle fois si cela d'avérait être une farce, il prit le livre et en lu les premières pages.


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" Hé l'jeunot, félicitation pour la promotion ! C'est la première fois que je vois quelqu'un d'aussi jeune en arriver là aussi rapidement. "

A dire vrai, il n'y était pas arrivé tout seul. L'ombre le suivait toujours, mais bien plus important, les secrets contenus de cet ouvrage mystérieux l'aidèrent grandement. Savoir lire entre les lignes était un talent qu'il se connaissait depuis bien longtemps et il ne le regrettait pas.

Bien des années après, il réussit à mener les convictions de la République jusqu'au sommet.


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" En tant que Président de la République, je proclame qu'Aurora sera désormais le centre de la nouvelle République. Je ne vous mentirai pas, les anciens mondes du Conservatoire sont l'actuel théâtre de guerre de différents groupes politiques. Nous avons gagné remporté la victoire ici, mais cela ne marque pas la fin de la guerre, elle ne fait que commencer !
Les ennemis de la République sont dors et déjà en mouvement, alors que nous festoyons notre victoire. Nous nous devons de défendre notre partie et les mondes qui sont actuellement républicains. Pour se faire, nous avons déployés nos armées sur les spatioports de Yhtio et de Alpha, en plus de la garnison déjà présente sur Aurora.
Quant à l'armada républicaine, celle-ci défendra jusqu'à nouvel ordre Aurora, notre capitale. Chers concitoyens, les jours à venir seront sombres et douloureux. La guerre est à notre porte et nous n'avons aucune alternative. Alors nous vaincrons, ensemble, pour la République !"

La Directrice de l'Ordre Progressiste, Kirsikka M. Rauha, était assise devant un écran, au dernier étage d'un immense bâtiment abritant laboratoires et bureaux de l'Ordre sur Valkoinen Aurinko. Les nouvelles, qui arrivaient à une vitesse telle qu'elle peinait à lire leurs titres, étaient dans l'ensemble plutôt bonnes. Les chantiers spatiaux avaient été remis en état, modernisés, et étaient maintenant capables de supporter la construction de nouvelles flottes qui seraient sans doute bientôt nécessaires. Poursuivant sa lecture, son attention fut attirée par l'un des titres. Consultant la nouvelle en question, elle ajouta rapidement une réunion avec d'autres membres du gouvernement à son agenda. Puis, encore préoccupée par ce qu'elle venait de lire, elle reprit sa lecture des autres rapports.

Le surlendemain, dans une des salles de réunion du même bâtiment, la Directrice de l'Ordre, son second, Rufus R. Petollinen, le Ministre de la Communication et celui de la Flotte Progressiste se trouvaient assis autour de la table. Cette réunion à huis clos avait pour but la nouvelle reçue l'avant-veille. La Directrice prit la parole lors de l'arrivée holographique du dernier participant : le Ministre des Affaires Extérieures :
« Bien, maintenant que nous sommes tous là... Vous devez tous avoir déjà entendu la nouvelle. »
Ses interlocuteurs acquiescèrent d'un hochement de tête. Le Vice-Directeur répondit :
« Une nouvelle assez... inattendue. Je ne suis pas sûr d'avoir compris tous les détails. Il se tourna vers le Ministre des Affaires Extérieures et continua : Que sait-on exactement de cette affaire ?
- C'est assez confus pour le moment. Nous savons avec certitude, grâce à nos réseaux, qu'un engin explosif de forte puissance a été déclenché dans les bureaux du Conservatoire. Apparemment, aucun membre du gouvernement n'a survécu à l'attentat et...
- Aucun ? L'interrompit le Ministre de la Flotte, vous êtes certain de vos informations ?
- Si elles n'étaient pas sûres, je ne vous les présenterais pas. Toutes les personnes appartenant aux hautes sphères du gouvernement Iraéen ont succombé à l'explosion.
- Et, reprit la Directrice, sait-on qui a organisé cette attaque ?
- Pour le moment, nous n'avons aucune certitude. Des vaisseaux corporatistes et républicains ont été aperçus dans les environs. Mais, cela pourrait tout aussi bien être une attaque interne... L'affaire étant relativement récente, nos informateurs sont encore affairés à collecter toutes les informations possibles. »
Il y eut quelques secondes de silence avant que le Ministre de la Communication, qui n'avait pas encore pris part à la conversation, prenne la parole :
« Le problème, c'est que nos opposants font déjà passer cet attentat pour une attaque menée par nos services spéciaux. Il va nous falloir démentir ces rumeurs et trouver rapidement des coupables au risque de perdre le soutien d'une partie de la population.
- Nous n'avons que l'embarras du choix, répondit le Vice-Directeur, si personne ne sait qui est l'auteur de cette attaque, nous n'avons qu'à trouver des preuves qui incriminent les Républicains. Ou, plus vraisemblablement, les Corporatistes. Ces sales idiots pro-libéralismes qui remettent en question la toute...
- Le choix reste à faire, l'interrompit la Directrice. Et il ne doit pas être fait à la légère.
- J'ai peut-être une idée, commença le Ministre de la Flotte, nous pourrions faire passer cela pour une opération conjointement menée par les Républicains et les Corporatistes. On pourrait ainsi accuser les deux camps en même temps.
- Une solution intéressante, répliqua le Vice-Directeur, mais cela pourrait amener les gens à penser que les deux camps sont alliés.
- Justement, continua la Directrice, quand les hostilités commenceront, ils ne vont certainement pas se faire de cadeau... Et à ce moment là, les gens qui les pensaient alliés verront qu'on ne peut pas leur faire confiance.
- C'est donc décidé, demanda le Ministre de la Communication, si c'est le cas, je vais mettre nos services au travail.
- Faites, lui répondit la Directrice. Il faut que tout soit prêt rapidement. »


Le Ministre pianota sur le clavier de sa console portative, transmettant ses instructions aux services de la Propagande et des Renseignements. Pendant qu'il écrivait ses ordres, la Directrice reprit :
« Inutile de préciser que nous avons renforcé les systèmes de sécurité. Nos équipes de chercheurs ont mis au point un prototype de scanner orbital sur lequel ils travaillaient déjà depuis un certain temps. Cette version souffre de quelques problèmes mineurs, mais elle remplit plutôt bien son office. Si jamais des vaisseaux transportant des produits dangereux, notamment des explosifs, arrivaient en orbite, ils devraient être repérés très rapidement. La sécurité du bâtiment a été renforcée, de nouveaux niveaux d'accès vont être mis en place.
- Sage décision, répondit le Vice-Directeur, mais une question me vient à l'esprit : Qu'en est-il des forces militaires Conservatistes ?
- Et bien, répondit le Responsable des Affaires Extérieures, d'après nos informations, elles ont ordre de rester en position défensive à leurs positions actuelles, en attente d'éventuelles nouvelles instructions qui n'arriveront vraisemblablement jamais. Nos espions tentent de convaincre une partie de leur flotte de nous rejoindre, mais, ça pourrait prendre du temps. »

Un appareil émit un petit son strident, avertissant la Directrice d'une affaire qui nécessitait son intervention. Elle se leva et salua ses interlocuteurs :
« Puisque nous avons réglé le problème dans les grandes lignes, je pense que nous devrions tous retourner à nos occupations. Nous risquons d'avoir fort à faire dans les prochains jours. »
Les autres personnes présentes physiquement dans la pièce se levèrent à leur tour. Se dirigeant vers la porte, Kirsikka M. Rauha ajouta :
« N'oubliez pas, la Science est Mère, nous nous devons de La protéger. »
Sur ces mots, elle quitta la pièce, rapidement suivie du Vice-Directeur, du Ministre de la Flotte et de celui de la Communication. Alors que la porte de la salle de réunion se refermait après le passage du dernier participant, l'hologramme du Ministre des Affaires Extérieures s'estompa, alors qu'on le voyait achever quelque prise de notes.

Attentat sur Irae

Hier, Irae a été victime de violent attentats. De puissantes explosions non-identifiées ont détruit les bureaux du Conservatoire. Tous les membres du Gouvernement de notre allié sont portés disparus, et nul doute qu'aucun n'aura survécu. La Régence Corpocratique prendra pied à la tribune d'ici la fin de mois afin d'annoncer sa prise de position. En outre, le Gouvernement nous fournira les résultats de ses analyses sur l'attentat.

Espérons qu'Irae n'aura trop souffert, car la lutte contre les fascistes pro-scientifiques et les Aurorians s'annonce difficile.

Le Financier, 1 Jileahn de l'an 15.871 TSU



- Avez vous vu les nouvelles, associés?
- Oui, Monsieur le Directeur. C'est dramatique!
- Nous venons de perdre notre allié. Cela nous mène droit à l'impasse, il faut réagir!
- Lucius, réveilles-toi! Profitons-en pour rassembler les gens autour de nous et fédérer les opinions!
- Tu as raison, Ethan. Il nous faut monter une campagne qui servira nos intérêts. Envoie une frégate de confiance vers Irae, il nous faut des informations... utiles.
- Pas de souci, je m'en charge.
- Appelez les journalistes, très chère.
- Bien sûr monsieur.
- Mes services vont s'occuper des... preuves.
- Excellent!

***************

Informations sur Irae

Lucius Idego, Directeur de la Corpocratie, a hier éclairci la situation concernant l'attentat envers les membres du Conservatoire. D'après les constats préliminaires, il s'agirait d'une attaque atmosphérique violente et sans pitié, visant à annihiler purement et simplement sa cible: "Nous pensons que les forces terroristes ayant commandités cette opération sont en possession d'un matériel d'excellente qualité, nous croyons à l'emploi de missiles nucléaires tactiques, voir peut-être d'armes bactériologiques!" L'Artemis Group a d'ors et déjà envoyé une frégate vers Irae dans le but de collecter des informations, alors que tous les regards se tournent vers les seuls terroristes qui auraient pu manquer d'autant d'honneur, les Progressistes.

Ces nouvelles ont choqué de nombreuses figures politiques et sociales, et de nombreuses têtes d'affiche, comme Aelita Sazowsky, la célèbre danseuse acrobate, on montré compassion envers les habitants du Conservatoire, livrés à eux mêmes.

Le Financier, 2 Jileahn de l'an 15.871 TSU


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Sa voix vibrait tandis qu'il s'adressait à la foule. Le maître poussant ses esclaves à la révolte. Le monde était suspendu à ses lèvres, le monde le suivait des yeux, le monde sentait ses émotions, le monde goûtait la fureur, le monde l'entendait. Et le monde l'acclamait, tandis qu'il les menait au gouffre de la guerre.

Une estrade, un micro, un homme. Des écrans sur toutes les planètes corporatistes montraient le moindre de ses gestes, rendaient le moindre de ses bruits. Les ondes se transmettaient dans l'Espace vers tous les mondes connus, annonçant la guerre civile qui déchiraient feu le Conservatoire.
Quatre hommes de main surveillaient les entrées, une femme délicieuse se tenait à sa gauche. Le président d'Artemis Group à sa droite. Et le très secret Ministre des affaires étrangères, officieusement Ministre de la Propagande, contrôlait les opérations.

La foule était transportée, en liesse.

- ... Et soyez sûr que les infâmes terroristes, ces prophètes de la Science et de la Violence, seront châtiés à la hauteur de leurs crimes! Leur immonde attaque bactériologique infecte encore Irae, les résidus nucléaires rendront invivable un large pan de la ville-capitale pendant des centenaires! Jamais homme n'aurait été aussi loin!
Mais ce ne sont plus des hommes. Ils ont scellé leur sort, se cachant derrière une Science omnisciente pour propager leurs idées TERRORISTES ET TOTALITAIRES!
Tant que je dirigerait la Corpocratie, soyez assurés que je ne laisserais jamais ces démons infliger leur torture aux hommes intègres, aux hommes de toutes les planètes, quelles qu'elles fussent! Nous combattrons le feu par le feu, et nous triompherons! Le feu divin qui nous anime, cette force de la Nature qui pousse l'Homme à se révolter contre le Mal, ce Feu nous emportera au triomphe!

Les ovations se prolongèrent, minutes après minutes. Et le soir encore, les mondes corporatistes résonnaient de chants patriotiques. Les jours qui suivirent furent semblable, tandis que la multitude d'individus fourbissait ses griffes, lustrait son poil et se préparait à de rudes années.








- Excellent, excellent.

Il ne fallut que deux jours aux services progressistes pour mettre en place un démenti formel, ainsi qu'une propagande des plus efficaces pour rejeter la faute sur ces chiens républicano-corporatistes, bien que le Renseignement n'aie aucune forme d'indice sur les véritables coupables.

Ce fut le Vice-Directeur Petollinen qui fut chargé d’apparaître sur tous les canaux de communication approuvés par la Science, de sorte à rassurer les Citoyens sur la situation. Depuis le balcon de son bureau sur Valkoinen Aurinko, face à une foule nombreuse et exubérante, et retransmis à des milliards de personnes à travers la Galaxie, son discours marquerait l'entrée en guerre de l'Ordre. Bien qu'étant le principal orateur, il était accompagné de la Directrice Rauha, et du Commodore Ilanko. Une grande drapure portant la devise de l'Ordre Progressiste, « In Science we trust » était tendue sous le balcon.

- ...et c'est en tant que Garant de la Science que je vous garanti que ces infâmes ignares ne resterons pas impunis ! Aveuglés par leur démesurée soif d'argent et de pouvoir, ils ont commis l'irréparable, et utilisé des armes biochimiques sales, massacrant des dizaines, des centaines de millions d'innocents citoyens ! Ces ignorants se proclament Républicains, quand ils ne sont que les pantins des infectes reliques d'un mode de pensée archaïque et décadents, les Corporations ! Pour satisfaire leur dieu-argent, ils n'ont pas hésité à vitrifier les Institutions du Conservatoire que nous défendons !

À ces mots, une clameur indignée monta de la foule, criant leur haine envers les Corporations, clameur qu'on pouvait entendre se répandre sur toutes les planètes dirigées par l'Ordre. L'air vibrait de ce dégoût qui venait de prendre vie au sein des spectateurs, et, si le son avait pu se propager dans l'espace, nul doute que les vociférations de la foule auraient pu faire trembler les tyrans corporatistes et républicains en personne. Attendant quelques dizaines de secondes, l'orateur finit par demander le silence d'un geste des mains qui se voulait bienveillant. Une fois la foule apaisée, il reprit :

- MAIS N'AYEZ CRAINTE ! L'Ordre Progressiste, grâce à la toute-puissance de la Raison et de la Science, ramènera la Paix, radiant au cœur du Chaos tel un phare guidant les égarés sous le giron bienveillant de la Science et de l'Empirisme ! Au contraire de ces incapables, gardés par leurs vulgaires cerbères pataugeant dans les fanges de la vilenie, se complaisant dans leur propre marasme intellectuel ! Aux gargouilles de la dépravation, vomissant leurs immondices à la dignité des honnêtes gens, j'adresse cet ultimatum :

UNE VISION SCIENTIFIQUE DU MONDE SOUS-TENDANT DES EXPLICATIONS NATURELLES POUR TOUS LES PHÉNOMÈNES, ÉVITANT LES SPÉCULATIONS SURNATURELLES ET PARANORMALES ET EMBRASSANT L'EMPIRISME ET LA RAISON COMME LES DEUX PILIERS D'UNE PHILOSOPHIE DE VIE APPROPRIÉE POUR UN ÂGE DE LA SCIENCE EST LA SEULE MÉTHODE GARANTISSANT À TOUS LE BONHEUR QUI LEUR EST DÛ ! RENDEZ-VOUS, ET LAISSEZ VOUS GUIDER PAR LE PROGRÈS, VOUS N'EN SEREZ QUE PLUS HEUREUX !

La fin de son discours, qu'il avait prononcé avec toute la vigueur qu'il était possible d'insuffler à une telle allocution, avait enflammé la foule. Partout, les gens criaient leur bonheur de servir la Science et réclamaient le début d'une guerre afin de rallier les pauvres hères égarés sur les chemins de la perdition à la toute puissance salvatrice de la Science. De son côté, la Directrice Rauha souriait. Tout se passait comme prévu.