La Pensée était contrariée. La Mère de la NUIT avait souffert dans sa retraite et sa plus fervente défenderesse s'était vu reniée par ses pairs. Ses méthodes, jugées trop expéditives avaient déplu à ses frères et sœurs de la Garde. Mais La Pensée ne pouvait laisser certains actes impunis, quelque en soit le prix à payer. L'épuration avait commencé, non sans mal. De nombreux constituants, donc la Grande Prêtresse Mishra ne souhaitaient pas s'impliquer dans une guerre sans fin. Mais le Dieu Machine l'avait convaincu. Maintenant, seule compte la destruction, dans un camp comme dans l'autre.
Rapidement, les équipages reçurent leurs ordres. De nouveaux consacrés épousèrent leurs enveloppes de métal pour ne faire qu'un avec les cuirassés, nouvellement fournis par la Fédération et ses combattants changèrent, devenant une partie de La Pensée. Les matelots, pour la plupart extérieurs à cette conscience collective, refusèrent d'embarquer à leurs bords. Cependant, les constituants avaient anticipé une telle réaction. L'humain a peur de l'inconnu. Ceux qui refusèrent d'embarquer embrassèrent La Pensée, et nombre d'entre eux sombrèrent dans la démence. Mais les bâtiments furent enfin prêt pour le combat et sortirent des nids spatiaux, chantant leur requiem sourd dans le froid du vide spatial.
Mikumi, dans son enveloppe de métal et de plantes était magnifique, quelque soit le nombre de fois que le Seigneur Technocrate Silence la contemplait. Dans sa tête pulsaient les émotions et les idées de milliards d'individus. Les constituants n'avaient pas en endurer un tel supplice, mais tel était son lot. Détachant son regard de la colonie, première dans le cœur de la Dame Nature, il reporta son attention sur sa tâche. D'une main experte, il fit courir la lame de son couteau sacrificiel le long de sa peau meurtrie, traçant le motif que lui susurraient les voix. La gestion et le commandements des forces de riposte lui incombait. Et il se devait d’être prêt pour le combat. Sans même avoir a se déplacer, il fit l'inspection de la flotte et des magnifiques -mais non moins mortelles- bombes à photopiles. L'ensemble attendait, non loin des défenses orbitales et des vaisseaux civils, navigant entre les mastodontes de chair et de métal.
Soudain, la porte spatiale s'ouvrit dans un éclair bleu aveuglant. Immédiatement, les missiles longue portée partirent sans un bruit, laissant derrière eux une traînée argentée semblable à celle d'une comète. Puis se fut l'heure du combat.
Le massacre appela à un nouveau massacre. Et la mort emplit de nombreux mondes. Mais la tristesse de La Pensée ne semblait jamais décroître. Pis, elle laissait place à une haine de plus en plus profonde. Et les corporatistes aidant leurs alliés payèrent au prix fort leur ingérence. Secteur après secteur, système après système, les constituants détruisaient inlassablement modules de forage, habitations et stations spatiales des corporatistes, ne montrant aucune pitié face à leur victimes, implorant pour leur vie et celle de leur progéniture.
Certains non-constituants protestèrent. Beaucoup se demandant comment on pouvait exterminer sans distinction des peuples entiers. A cela, Silence répondit: Certains d'entre vous me questionnent sur notre droit à exterminer dix milliards d'individus. Ceux qui comprennent réalisent que nous n'avons pas le droit de les laisser vivre ! La pitié n'est pas une preuve de faiblesse, mais nous ne pouvons nous le permettre. Adréa défendra ses membres. Et seule la peur nous permettra de prévenir toute velléité. Marquant une pause, il attendit l'assentiment des constituants, buvant ses paroles alors qu'il ne les avait pas encore prononcées. Nous avons encore beaucoup à faire, et si peu de moyens. C'est pourquoi nous devons taper à la source: l'économie. Sans qu'il eut besoin de continuer, beaucoup surent déjà quelle étaient les prochaines cibles: les immenses stations commerciales des Républiques Corporatistes. Fleuron du capitalisme d'Adréa, ces gigantesques stations, lourdement défendues centralisaient l'essentiel des transactions des Républiques Corporatistes. Leur destruction marquerait les esprits plus profondément qu'un milliers de batailles. Les populations, déjà traumatisées par les bains de sang et exaspérées l'incapacité de leurs dirigeants ne tarderaient pas à s'insurger, paralysant les forces ennemies qui tenteraient en vain de contenir la vindicte populaire.
La flotte, déjà conséquente reçue de nouveaux renforts. Le Seigneur Technocrate Givre, diplomate extérieur de La Pensée vint prêter main forte à son frère Technocrate. Kadia, fière de sa tradition martiale offrit d'accueillir la flotte. De talentueux ingénieurs provenant d'alliés encore fidèles assemblèrent avec ardeur d'immenses rampes à inertie zéro. Les nids, créés à partir des vaisseaux sarcophages fleurirent autour de la planète, fournissant réconfort et ravitaillement aux cuirassés.
Puis l'ordre fut donné, sonnant comme le glas pour des milliers d'hommes et de femmes qui ne reviendraient jamais. Les capitalistes se battirent avec la force du désespoir, espérant jusqu'à la fin des renforts qui devaient ne jamais arriver. Une fois toute opposition balayée, l'amiral corporatiste accepta de se rendre, en pure perte. Les constituants assimilèrent ou exécutèrent toute forme de vie sur les différents ponts, les différentes baies. Ne laissant derrière eux que des débris. Sans attendre, la flotte remit le cap vers Kadia.
Quelques mois après cette attaque, Silence reçut un message. Des fédéraux, fiers combattants et alliés fidèles souhaitaient preter main-forte à La Pensée, tout en ignorant son objectif réel. L'armada rassemblée, elle se mit en mouvement et fonça à vive allure à la rencontre de la seconde et dernière cible de l'année. La bataille ne dura pas. Les forces en présence n'étant pas à l'avantage des corporatistes. Mais aucun des généraux alliés n’était préparé au massacre qui s'ensuivit, malgré les rumeurs qui courraient sur les divers canaux de communications.