Ma vie vous appartient

Une déclaration de guerre ? Une bataille épique à raconter ? Venez ici !
Ven Déc 11, 2015 1:53 am

  • L’infante planta son couteau dans l’astracom. Cet amaranth avait eu le culot de se moquer d’elle. Elle. Elle pestait, hurlant à qui voulait l’entendre qu’elle réclamait sa tête sur un plateau. Butor avait l’habitude de ce genre de crise. Mais jamais il ne l’avait vu aussi remontée depuis des années TSU. Mais il n’avait pas le temps d’être prudent. Il avait une information qui allait surement lui faire plaisir. Et puis, après tout, il avait déjà pris des coups de couteaux dans sa vie, un de plus ne devrait pas le tuer. Il pénétra sans prendre la peine de frapper dans le bureau. Une lame se ficha dans la porte, à quelques centimètres de son œil. Il essaye tant bien que mal de l’ignorer et commença son rapport.
    Des centaines de rapports de mission font état d’une structure pirate de taille gargantuesque. D’après nos espions sur Thelios, il semblerait que les pirates possèdent une Grande Porte. Espen se redressa d’un bond sur son fauteuil rembourré. Le pauvre avait eu la vie dure et était entaillé à de nombreux endroits. Butor nota dans un coin de son esprit de penser à lui en faire livrer un autre, le sixième en deux semaines. La fillette, qui bientôt n’en serait plus une le regardait comme un regard qui le dérangeait. Qui le dérangerait toujours. Un mélange de plaisir enfantin et de furie barbare. J’ai fait dépêcher douze cent sondes pour la cartographier. Il semblerait que les pirates la laissent allumer en permanence. Et mieux encore, ils n’ont pas montrés de signe d’hostilité. Les sondes ont pu établir un modèle tridimensionnel de la porte. Nous avons même réussi à traverser.
    Le Premier Général marqua une pause. Sous l’excitation, l’impératrice avait serré la lame qu’elle tenait dans ses mains et s’était entaillée. Il s’attendait à devoir plonger pour éviter un éventuel projectile. Cependant, il ne vint pas. Espen se contenta se lécher la plaie en faisant un signe de sa main valide, un signe montrant une impatience grandissante.
    Un des pirates que nous avons capturé nous a dit que le cadran de destination de la porte s’appelait le Corridor de Verdon. Il s’agit d’un cadran d’à peine un millier années-lumière d’après une première estimation. Et il semblerait qu’une troisième porte mène jusqu’au cadran d’Aelron. Nouvelle pause. Les yeux de l’infante lançaient des éclairs. Les seuls contacts que le Comptoir avait avec Aelron provenaient de la Station Diplomatique Centrale, une immense structure permettant de relier les réseaux de communication des différents cadrans. Et visiblement, Espen avait déjà une liste de cibles. Il poursuivit son rapport, mais elle ne l’écoutait plus.

    Yelena Sokov n’avait pas eu une vie facile. Orpheline, elle avait appris très jeune que l’argent était essentiel. Elle avait vendu son corps pour survivre, laissant des porcs abuser d’elle en échange d’une poignée de crédits. Puis elle avait découvert les Sœurs de la Piété. Cet ordre ancestral n’était en fait qu’une couverture pour un réseau de prostitution de luxe. Elle avait d’abord pensé qu’elle n’avait pas bougé d’un pouce. Mais avec le temps, elle se rendit compte que ses clients étaient plus attentionnés, et surtout, plus puissants et fortunés. Elle avait quitté les bas-fonds sordides où se mêlaient poivrots et coupe-jarrets pour boire des cocktails dans des soirées mondaines au bras d’un industriel ou d’un politique. Certes, elle se vendait toujours comme une marchandise mais au moins, elle pouvait profiter des plaisirs qu’apportait sa « fonction ». Et les drogues lui permettaient de s’évader quand sa condition lui pesait.

    Le soir de son trentième anniversaire, elle accompagnait un magnat d’Erh Egor. Elle riait à ses blagues vaseuses, remplissait son verre et exhibait ses courbes dans une robe coutant plus cher que son appartement. Le travail habituel. Cependant, ce jour devait marquer un tournant dans sa vie. Un de ses talons -démesurément hauts comme le voulait la mode sur la planète- se casse et elle tomba à la renverse. Sa chute aurait marqué la fin de sa carrière et aurait provoqué un éclat de rire général. Mais un bras salvateur la retint et son pirouette passa inaperçue. Alors qu’elle allait remercier son sauveur, elle se décomposa. Celui-ci n’était autre que Septi Egor, l’actuel gouverneur et petit-fils du fondateur de la colonie. Elle resta plantée là, embêtée comme une vache devant un train magnétique, en équilibre sur un pied tandis qu’il la dévisageait.
    Le gouverneur était un homme de la quarantaine d’année, plutôt bel homme sans pour autant être un canon de beauté. Il avait succédé à son aïeul quand celui-ci avait décidé de se retirer et il avait développé la planète avec brio, la transformant en centre industriel d’un royaume en plein expansion. Il mit un genou à terre, soulevant légèrement sa robe et lui enlevant ses talons. Puis il se redressa et l’attira à l’étage. De toute sa vie, jamais elle n’avait aimé un homme comme elle l’a aimé. Et cette nuit marqua le début d’une relation passionnée, tout du moins pour elle qui allait la conduire à sa place actuelle.

    Quatre années s’étaient écoulées. Yelena était devenu la favorite d’Egor, faisant d’elle la femme la plus influente de la planète. Elle avait vécu mille et une choses fantastiques, allant même jusqu’à voyager dans un vaisseau de luxe jusqu’à Elenia, la planète capitale du royaume. Elle avait rencontré Espen, sa future reine et Belir, son père, le roi. La jeune princesse allait sur sa douzième année et sa beauté avait frappé la favorite. Elle se sentait fade à ses côtés. Ils rentraient à peine de leur séjour qu’un soldat se présenta à l’entrée de leurs appartements. Celui-ci était nerveux et pressait le gouverneur pour qu’il rejoigne le centre de contrôle, quatre-vingt étages plus bas. Un message de la plus haute importance l’y attendait. Le roi était mort. Il avait été assassiné. Sa fille, Espen s’était nommée impératrice et demandait à tous les anciens serviteurs de son défunt père de lui prêter allégeance.

    Yelena ne comprit pas la réaction de son amant. Celui-ci se rebella et refusa de reconnaitre Espen comme son impératrice. Elle apprit le lendemain que l’infante avait elle-même poignardé son père et avait pris sa place sur le trône. Les Egor avaient toujours été fidèles au roi et Septi, en tant que dernier représentant de sa lignée ne comptait pas changer cet état de fait. Ainsi, Erh Egor fut déclaré monde paria et une armada de sécurité fut dépêchée de la bordure extérieure du nouvel empire pour aller y mater la rébellion. Il lui faudrait cinq mois pour arriver et le gouverneur avait bien l’intention de mettre ce temps à profit pour se préparer. Il nationalisa toute l’industrie et transforma les usines en fabriques d’armes. Il sonna la mobilisation générale et enrôla plus de dix-huit millions d’hommes et de femmes pour les former au combat.

    Pendant ce temps, Yelena était seule. Son amant dormait peu, ne rentrant plus qu’une fois par semaine. Elle se sentait de plus en plus délaissée. Pour combattre l’ennui, elle alluma l’astracom. Même si l’empire, qui avait pris le nom de Comptoir d’Espen avait coupé toute possibilité d’envoyer des messages, ils continuaient d’en recevoir. La femme se perdit dans le flot d’information qui arrivait. Sur les quatre colonies qui composaient le royaume, deux d’entre elles avaient fait sédition. La seconde était Rok, une planète peu développée sur la bordure orientale de l’empire. La jeune impératrice y avait envoyé la troisième flotte de défense pour y faire régner l’ordre et purger la planète. Krya, la capitale avait été rasée depuis l’orbite. Quarante millions de morts en quelques secondes. La planète avait capitulé dix-sept minutes plus tard. Mais Espen avait refusé la capitulation. Et la purge avait commencée. L’ensemble de la classe dirigeante -du gouverneur, tiré de son bunker par des troupes de choc au petit haut fonctionnaire- avait été pendue sur un échafaud construit sur les ruines encore fumante de l’ancienne capitale. Cent vingt millions de personnes furent déportés vers les autres planètes de l’empire.

    Yelena était fascinée et effrayée à la fois. Elle savait qu’Erh Egor pouvait résister un temps à l’impératrice. Mais ils finiraient par manquer de tout, la planète ne pouvant subvenir aux besoins des trois cent millions d’habitants. D’un coup, l’astracom émit un bip sonore. Le son caractéristique d’une annonce officielle. Intriguée, la femme valida la transmission et commença à regarder la jeune impératrice. Celle-ci était sur le pont d’un vaisseau, en arrière-plan, Elenia resplendissait. Le discours avait déjà commencé.
    …L’avènement d’une nouvelle ère. Finies ces années d’immobilisme où une poignée d’individus, pourris par l’argent et le pouvoir ont freiné le progrès en marche. Le Comptoir a rejoint le Dominion Zetran. Bientôt, le Comptoir règnera sur des dizaines de mondes, des centaines de mondes et ce, sur des milliards d’années-lumière. Nos troupes s’emploient actuellement à traquer et à punir tous les traitres et les dissidents, où qu’ils soient. Une explosion retentit. Il fallut à Yelena un moment pour comprendre qu’elle ne provenait pas de la vidéo. L’image se brouilla pendant une bonne minute. Puis elle revint.
    Soyez loyaux, soyez fiers et vous serez l’avenir de l’univers !
    Puis une alarme se déclencha et un soldat ouvrit la porte en trombe. Il s’arrêta à quelques mètres de la favorite.
    Vous allez bien ? Il semblerait qu’une bombe ait explosé dans le bâtiment des finances. Il menace de s’effondrer. Mais vous etes en sécurité ici. Ne sor… Le malheureux n’eut pas le temps de finir. Un homme s’était glissé derrière lui et lui avait tranché la gorge. Il regarda sa victime se vider de son sang pendant quelques instants puis se tourna vers Yelena. Il la pointa avec son bras, sur lequel était fixée une arme cinétique.
    Vous etes seule ? Apres un temps, la femme acquiesça. L’homme ferma la porte et y posa un verrou magnétique. Puis il sortit une combinaison et un module de propulsion dorsal de son sac et commença à s’equiper, tout en menaçant Yelena de son arme. Celle-ci le regardait avec insistance, puis lui demanda :
    Pourquoi faites-vous cela ? L’homme arrêta sa besogne, la dévisageant un instant.
    Parce que je suis loyal à l’impératrice, et vous devriez en faire autant. Puis il finit de s’équiper. Faisant fi de toute discrétion, il changea de cible et pointa une des baies vitrées de la pièce. Trois projectiles partirent de son gantelet et traversèrent le verre haut résistance comme si ça avait été du papier, projetant les éclats dans la rue deux cent mètres plus bas. Avant qu’il ne saute et prenne son envol, elle lança avec un ton proche de la supplication :
    Mais je ne suis qu’une femme, je ne peux rien faire. Il tourna la tête vers elle.
    Espen n’est qu’une fillette après tout Puis il abaissa la visière de son casque et sauta dans le vide avant de repasser deux secondes plus tard devant la fenêtre, s’envolant grâce à son propulseur.

    L’incident eu un effet dévastateur sur le moral des combattants. Outre les soixante-quinze morts dans l’attentat, c’est surtout le sentiment que la guerre avait vraiment commencé qui minait les troupes. Jusqu’à présent, ils n’avaient fait que s’entrainer, peu d’entre eux était vraiment préparés pour un vrai combat. Le gouverneur avait tenté à plusieurs reprises de remotiver ses hommes, sans grand succès. Yelena ne le quittait plus d’une semelle, le suivant à chaque réunion. Ce que lui avait dit le terroriste le travaillait. S’ils continuaient comme ils le faisaient, ils allaient tous mourir, emportant avec eux une bonne partie de la population. Mais ils ne pouvaient pas non plus se rendre et s’exposer à la purge. Elle ne trouvait pas de solution et maudissait son inutilité.


    Le troisième jour de Volahn, la seconde flotte de défense sortit de l’hyperespace à moins d’un milliard de kilomètres d’Erh Egor. L’armada était composée de quarante-quatre vaisseaux de tonnages divers. Au milieu de la formation trônait Lerhech, fleuron du royaume devenu empire. D’ici sept heures, les forces du Comptoir seraient à portée de canon. Mais la flotte de défense coloniale, fidèle au gouverneur ne résisterait pas plus de quelques heures. L’état-major était rassemblé dans le centre de commandement, bunker enfoui à plus d’un kilomètre de profondeur. Tous attendaient car à partir de maintenant, leur sort n’était plus entre leurs mains.
    Yelena sursauta. L’écran principal montrant l’avancée de la flotte avait soudainement changé. Espen, avachie dans le fauteuil de commandant du croiseur lourd était apparue. Malgré son jeune âge –l’impératrice avait alors d’à peine plus de douze ans-, elle ne ressemblait pas à une enfant. Son regard était empli de tristesse, comme celui d’un vieillard repensant à ses amis disparus. Puis elle se redressa et son air enfantin revint. Son visage se para d’un sourire qui aurait fait fondre une brute.
    Mes salutations Septi Egor. Je suis attristée de vous perdre aujourd’hui. Vous avez été un gouverneur de génie. Vous auriez eu votre place dans mon empire. Mais vous avez tout gâché. Elle affichait toujours son sourire. J’avais une seule question à vous poser. Pourquoi ?
    Le dernier descendant d’Egor la toisait avec mépris. La fillette qu’il encensait une année auparavant été devenu pour lui un être répugnant et perfide.
    Vous avez craché au visage de vos ancêtres. Vous avez détruit en un battement de cils ce que votre père avait mis plus de quarante ans à bâtir. Et vous avez le culot de demander pourquoi je refuse de vous suivre dans votre folie.
    L’infante détourna le regard un instant. Un colonel apparu à l’écran. Il se pencha légèrement vers l’impératrice mais ses mots étaient parfaitement audibles.
    La flotte coloniale est à vos ordres. L’amiral Strak a prêté allégeance. Bek et ses hommes attendent leur feu vert. Il se tourna vers l’écran. Yelena sursauta à nouveau. Elle avait reconnu l’homme qui s’était enfuit par la fenêtre de ses appartements.
    Bien, rejoins le et commencez. Puis elle fixa à nouveau son attention vers le gouverneur. Vous appelez ça de la folie. Cependant, un sacrifice est parfois nécessaire pour assurer le bien d’un plus grand nombre. Je vais détruire la pourriture qui gangrène le Comptoir. Mais je n’ai plus à vous convaincre, vous avez choisi votre camp.
    Septi s’était levé. Il bouillonnait de rage. Il allait répondre quand il vacilla. Yelena avait enfin compris. Elle s’était elle aussi levée. Et elle avait plantée la dague qu’elle portait à la ceinture dans le dos de son amant. Sans que personne ne réagisse, elle s’approcha de l’écran, couverte du sang de l’homme qu’elle avait aimé.
    Moi, Yelena Sokov Sa voix dérailla. Moi, Yelena Sokov prête allégeance au Comptoir et à son impératrice, Espen. Ma vie vous appartient. Elle se retourna sans attendre de réponse. Les amiraux et généraux présents la regardaient, médusés. La femme se pencha sur le cadavre du gouverneur. Puis elle se releva, l’arme de son amant en main. Elle ouvrit le feu jusqu’à ce que son chargeur soit vide, jusqu’à ce qu’il ne reste plus personne en vie à part elle.


    Yelena n’avait pas eu une vie facile. Elle se remémorait chaque épisode de sa vie avant chaque rencontre avec son impératrice. La catin était devenue gouverneur, maitresse et guerre et tant d’autres choses au fil du temps. Mais l’heure n’était pas aux souvenirs. Sans plus attendre, elle franchit la porte qui devait la conduire jusqu’à Espen. Butor était là. Il n’avait pas changé depuis la première fois qu’elle l’avait rencontré, dans cet appartement. Mais elle avait changé. Elle avait énormément changé. Alors qu’elle entrait, il s’inclina respectueusement et sortit. La presque femme commença sans préambule.
    Tu pars immédiatement. L’amiral Jinta t’attend à bord du Cerni, il t’expliquera les ordres de missions à bord. Mets en ordre tes affaires, tu pars pour plusieurs années. Puis l’infante fit pivoter son siège en direction de la baie vitrée donnant sur le spatioport, signe que la discussion était close.


    Le Premier Corps Expéditionnaire du Comptoir était une flotte impressionnante. Le Cerni, cadeau du Consortium d’Hyansun au Comptoir était accompagné de vingt et un croiseurs d’escorte, de cent trente croiseur d’interception et de cent deux ravageurs. Mais outre la formation de croiseurs, l’armada pouvait compter sur plus de quatre cent mille chasseurs, dont cinquante mille Aigles Rouges, les nouveaux chasseurs lourds à armement polyvalent et cinquante mille chasseurs lourds à torpilles à plasma. Jamais Yelena n’avait vu de flotte aussi imposante de ses yeux. Pour parfaire le tout, trois millions de soldats, choisis parmi les forces d’élites de Yelena avait embarqué dans les Ruches. Elle ne connaissait pas encore exactement les cibles, mais la maitresse de guerre savait qu’ils allaient regretter de s’être mis sur le chemin d’Espen.
    Jinta l’avait rapidement briefé. Ils partaient pour Aelron. Yelena avait demandé comment l’armada comptait s’y rendre, mais l’amiral ne lui avait pas répondu. Maintenant, elle comprenait. La structure était encore à un demi-milliard de kilomètre, mais elle éclipsait déjà des planètes entières. A cette distance, elle ne distinguait pas encore l’effervescence qui régnait autour de la porte pirate. Mais elle se doutait bien que les pirates et autres contrebandiers devaient pulluler.

    Alors qu’ils s’approchaient à portée de tir, une communication arriva. Un homme borgne apparut à l’écran. Il contrôlait cette structure et demandait ce que venait faire des zetrans aussi loin de leurs territoires. L’amiral se contenta de lui donner une série de chiffres. L’homme sembla satisfait. Il leur dit qu’ils pourraient traverser le vortex et qu’ils pouvaient passer boire un coup s’ils le désiraient. Ce n’était pas souvent qu’on le payait aussi grassement. L’amiral accepta son invitation et décolla un quart d’heure plus tard, accompagné d’une centaine d’hommes. Yelena préféra rester à bord du Cerni et contempla pendant plus d’une heure la surface changeante du vortex. La porte était tellement grande que la flotte n’avait même pas besoin de rompre la formation. Quand Jinta revint, tous les vaisseaux traversèrent.

    Verdon était un petit cadran. Plus petit encore que les territoires zetrans et ceux-ci ne représentaient qu’un cinquantième de Varden. Contrairement aux abords de la portes –car il y avait une structure identique à l’arrivée avec un pirate à peu près similaire à sa tête, mais avec deux yeux- le reste du cadran était désert. Certains hommes ayant discutés avec des pirates parlaient d’une planete, appelée Havre Noir qui leur servait de base dans ce cadran. Mais Yelena doutait que des pirates puissent s’entendre suffisamment pour ne pas se massacrer s’ils se retrouvaient sur une même planète plus de quelques jours. Malgré le peu de distance séparant la porte menant au cadran et Varden à celle menant à Aelron, le trajet fut long. Il leur fallut plus de six mois pour enfin arriver dans la dixième région d’Aelron.

    A peine avaient-ils traversés queJinta déclara l’état d’alerte maximal. Ils étaient à présent isolés du Comptoir et ne pourraient recevoir de renforts. Mais qui pourrait ne serait-ce que résister à une telle puissance de feu. Rapidement, ils rejoignirent une porte spatiale à l’abandon. En quelques jours, les techniciens l’avaient remise en marche et une photopile fut déchargée d’un Moissonneur Rouge pour l’alimenter. Alors qu’elle inspectait le stock, Yelena tomba sur une salle que son niveau d’habilitation ne pouvait ouvrir, chose incompréhensible vu qu’elle possédait le niveau le plus haut après Espen et Butor, plus haut encore que l’amiral Jinta lui-même. Par l’intercom, elle contacta le commandant du transporteur pour obtenir plus d’informations.
    Je suis actuellement devant le sas 14-07-12. Mon pass ne fonctionne pas. Ouvrez moi, je dois contrôler les stocks. L’homme la regarda avec amusement. Puis il se rappela qu’il avait à faire à la personne la plus dangereuse après l’impératrice.
    Je ne peux pas ouvrir ce sas, ni les deux suivants. Et heureusement. Les compartiments contiennent des bombes à photopiles. Les ingénieurs ont verrouillés les accès donnant vers l’intérieur par sécurité. Ils doivent être largués sur la cible
    L’intercom sonna, coupant la communication. Jinta lui demandait de rejoindre la passerelle de son vaisseau, ce qu’elle fit sans tarder. Puis il lui exposa le plan.

    Deux heures plus tard, le vortex s’ouvrit et l’armada arriva sur le monde-capitale de l’Imperator Silesvar, l’actuel dirigeant de l’Empire Amaranth. La bataille spatiale ne fut pas spécialement impressionnante. Les forces amaranthes furent balayées et les bombardiers commencèrent à cracher leurs projectiles en direction de la planète. Pendant trois jours, les vaisseaux pilonnèrent les villes principales, puis secondaires pour enfin tirer sur ce qui semblait encore tenir debout. Quand les canons se turent, ce fut à Yelena d’agir.

    La maitresse de guerre attendait à bord de son vaisseau de débarquement. Construits sur le modele de l’E-Sidus Gloriae, choisis pour sa coque renforcée, et surtout, sa capacité à entrer dans l’atmosphère à une vitesse supérieure à bon nombre de vaisseau, les Porteurs de Désolation étaient réservés aux troupes de chocs. Chacun des quatre vaisseaux contenait un bataillon complet de tripode et cinq bataillons choisis personnellement par Yelena. L’objectif était simple, ils débarqueraient avant le gros des troupes, trouveraient l’Imperator et l’exécuteraient sur le champ.

    Pendant les quinze minutes de descente, rien ne se passa. La défense semblait avoir été exterminée par le pilonnage. Et effectivement, les survivants étaient peu nombreux et désorganisés. Yelena n’avait pas enfilé d’armure de combat depuis plus de trois ans. Mais un enfant aurait pu en utiliser une si on la concevait à sa taille. Les servomoteurs accéléraient les mouvements et décuplaient la force tandis qu’un subtil cocktail de drogue de combat augmentait les réflexes et l’acuité visuelle. La femme avait désactivé l’IA de visée et profitait pleinement de la décharge d’adrénaline qui précédait le combat. Elle voulait tuer, c’était tout ce qui lui importait à cet instant. Et c’est ce qu’elle fit.

    Dans les ruines de ce qui avait été la capitale de la planète, des conscrits s’étaient retranchés. Mais ils ne faisaient pas le poids. Yelena fit exploser le mur d’un bunker à l’aide d’une roquette puis s’engouffra dans la brèche d’un bond, franchissant les trente mètres de no-man’s land qui la séparait de sa première victime. Elle l’attrapa au vol, arrachant sa tête d’une baffe. Puis elle fit une roulade et activa son gantelet cinétique, projetant des milliers de projectiles et balayant la pièce. Elle allait achever le seul survivant quand elle se rappela son ordre de mission. L’homme avait abandonné son arme et rampait pour se mettre à l’abri sous une table. Elle lui écrasa la jambe, broyant les os sous le poids de son armure. L’homme poussa un hurlement de douleur. La maîtresse de guerre l’attrapa et le souleva pour que sa tête soit au niveau de sa visière qui commençait à devenir translucide.
    Où se trouve l’entrée du bunker de commandement ? Où se trouve ton empereur ? Parle et j’abrégerais tes souffrances. L’homme pleura, implorant la femme de lui laisser la vie sauve. Mais il finit par parler. Il lui apprit que l’empereur n’était pas sur la planète. Il n’était pas là au moment de l’attaque. Il était parti une semaine plus tôt pour une visite de contrôle sur une colonie. Yelena fracassa le crâne du lâche et activa son communicateur, ordonnant à ses hommes de se retirer. Les troupes régulières n’avaient pas encore débarqués mais ils se chargeraient de prendre le contrôle de la planète et de récupérer ce qui pouvait l’être.

    Tandis qu’elle retournait au vaisseau, elle remarqua un édifice pas encore entièrement détruit. Par curiosité, elle s’en approcha. L’IA lui apprit qu’il s’agissait d’une aile du palais impérial. Elle inspecta rapidement les salles qui ne s’étaient pas effondrées et finit par trouver un trône richement orné. Exténuée, elle s’affala dessus, le fissurant en de multiples endroits. Elle resta là jusqu’à ce que son second l’appelle et l’informe que tous les hommes étaient rentrés et qu’ils l’attendaient.

    Le retour en orbite fut court. Mais il lui sembla durer une éternité. La chance s’était jouée d’elle et elle n’avait pu accomplir sa mission. Elle aurait aimé tuer de ses mains le chef de ces impériaux décadents. Elle dut se contenter du spectacle de l’explosion des bombes à photopiles atomisant les structures orbitales.
    Dernière édition par Comptoir d'Espen le Dim Déc 27, 2015 10:59 pm, édité 1 fois.
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Jeu Déc 17, 2015 8:08 pm

  • Sur Harlonduneï, à Arân-thryn, la capitale, tout était calme. Malgré la guerre lancée contre les pirates du verdon qui avaient débarqué en aelron deux ans plus tôt et avaient infligés de sérieuses défaites à une flotte Harlondaise vétuste, tout en malmenant sérieusement les économies de nombreux empires, Tauriel Féataure regardait calmement le soleil rouge se coucher derrière la tour relativement grande (120m) Est du palais impérial d’Harlonduneï, en illuminant le ciel d’une lueur rouge qui ressortait d’autant mieux sur la pierre ocre du palais. Un homme, le premier conseiller Galun Valyrien, vient faire un bref passage à ses côtés avant de repartir, lui disant que tout était en ordre depuis plusieurs heures maintenant. Par curiosité, elle scruta la nuit tombante, espérant y distinguer quelque chose autre que quelques étoiles sur ce monde sans lune, mais ne trouva rien et finalement s’endormie.

    Justement, à quelques années lumières de là, dans ces étoiles, un cargo escorté par les tous derniers intercepteurs Ercanethel rentrait sur le monde mère. Avec les pirates, Tauriel avait imposé l’ajout d’une escorte aux flottes de récolte, et celles-ci avaient l’ordre de surveiller le plus de territoires possibles avec leurs radars. Et comme le constatait la capitaine Anna Gulina il y avait du mouvement, mais pas celui qui était attendu.

    Qu’est ce que c’est que ça ? Ne put-elle que demander face à ce qui ressemblait à une énorme flotte zétranne relativement proche d’eux, mais qui semblait les ignorer pour marcher vers Sylesvar.
    Dans le vaisseau, la nouvelle se répandait. Personne ne comprenait vraiment ce que la flotte venait faire là, mais une chose était sûre, tout le monde était bien content qu’ils ne soient pas repérés.

    Que fait-on ? Lui demanda son second, qui venait d’entrer précipitamment dans la salle de commandement du vaisseau sur son ordre transmit par l’appareil de communication du vaisseau.
    On pourrait rentrer et prévenir Harlonduneï immédiatement par exemple non ? Répondit-elle sur le coup de la tension.
    L’autre ne pris pas garde au ton qu’elle avait employé, et s’exécuta rapidement.

    Sur Harlonduneï, personne ne détectait la flotte, mais selon le rapport du capitaine Gulina, elle devait arriver sous peu dans la zone de détection du poste de contrôle. Et puis de toute façon, personne n’irait inventer une flotte de plusieurs centaines de croiseurs, et on pouvait difficilement confondre ce genre de vaisseaux avec des cargos, même grands.

    On avait donc réveillé Tauriel qui s’était endormie sur un siège de la terrasse du palais principal, et on avait réunis l’état-major, tandis que des canaux étaient ouverts avec les dirigeants des autres états membres des provinces coalisées. Tout le monde était donc présent de manière directe ou non dans la salle de communication du palais impérial Harlondais richement ornée de tapisserie et de tapis en tissus. Lorsque Tauiel avait été suffisamment réveillée pour prendre conscience de ce qu’il se passait, elle avait pris le commandement des opérations de défenses.
    Rapidement, une sonde fut envoyée en surveillance sur la position d’où partait la flotte, alors que cette dernière était désormais visible depuis le poste de contrôle. L’Imperator mis le système sous œil céleste, et pus confirmer les informations données par la province du Harlond.

    La flotte du comptoir d’Espen allait arriver prochainement sur la planète mère de l’Imperator, mais heureusement il n’y était pas, et peut être que des renforts pourraient être envoyés, seulement rares étaient les forces Amaranth en région 4 disponibles, et Tauriel avait refusé d’envoyer en défense les quelques Ercanethels de Harlond, qui au grand étonnement de tout le monde n’était pas visée.
    Mais pourquoi ? Demanda l’amiral Olotha.
    Parce que cela ne servirait à rien. Répliqua sèchement Tauriel. Les Ercanethels ne sont pas fait pour affronter une flotte de front. Mieux vaut les garder pour perturber l’ennemi sur les flottes de pillages légères qu’il enverra peut être. De toute façon, ils ne serviraient à rien dans cette bataille. Je suis désolée Impérator, la construction de ces portes pirates est quelque chose que je n’avais pas prévus.
    Je comprends, répondit ce dernier. La majorité de ma flotte va évacuer, elle à une mission à remplir. Un instant, son visage fut traversé par un air de revanche, qui intrigua la vice-impératrice.
    Laquelle ?
    Nous venons de localiser leur vaisseau amiral. A l’heure qu’il est, ma flotte va partir, et devrait purger la position rapidement, tout du moins avant qu’ils ne puissent faire quoi que ce soit.
    Soit, je vous laisse la direction de la suite des opérations dans ce secteur. Amiral, des nouvelles du reste ?
    Tout à l’air calme...
    Par la suite, il s’avéra que rien ne semblait changer la donne, les zétrans, plus précisément du comptoir d’Espen, puisque c’était de lui qu’il s’agissait, ne semblaient pas lancer de nouvelles opérations. Mais pendant les deux jours suivants, elle ne put dormir beaucoup, tant la tension était forte sur Harlonduneï. Toute la planète scrutait l’espace, à l’affut de la moindre flotte susceptible de s’approcher du monde mère sans autorisation.

    Rapidement, elle fut brusquement alertée et ramenée plus ou moins de force dans la salle qu’elle avait été si heureuse de quitter. L’état-major Harlondais était resté actif dans la salle 24h sur 24, et les liaisons avec les autres états coalisés étaient restées ouvertes.
    Que se passe-t-il encore ? Demanda-t-elle à moitié affolée, la crainte de voir Harlonduneï en ruine ne l’épargnant pas plus que les autres.
    Un homme croyant qu’elle allait défaillir et qu’elle serait mieux assise apporta à toute vitesse un siège rembourré qui trainait dans un coin de la grande salle richement ornée. Elle le regarda faire sans comprendre avant de s’assoir, et d’écouter la réponse de son amiral.

    Nous venons de repérer une flotte composée de plusieurs centaines de milliers de chasseurs en train de se diriger vers l’AIA de la république Galiptienne. Une flotte vient également de bombarder l’AIA de l’Imperator Sylesvar, Kas’hir Droujy, émissaire de la république Galiptienne confirme. Il vous demande également vos instructions.
    Ont-ils une flotte militaire au moins ? Parce que j’ai l’impression que personne n’a grand-chose…
    Répondit-elle dépitée. Pour l’instant, elle se sentait relativement impuissante.
    Oui, ils ont un croiseur amiral anti chasseur, et d’autre bricoles. Ils ont pensé que cela pourrait vous intéresser.
    Un peu oui! Dit-elle en redressant la tête avec intérêt. La route spatiale qui part de la région 2 pour aller vers la région4 est active ?
    Oui, le ministre des transports me l'a confirmé il y a 20 minutes.
    Qu’ils envois leur croiseurs amiral intercepter cette flotte alors !
    Bien, je transmets vos instructions.
    A ce moment là, l’Imperator réapparut de nouveau dans la salle de communication du palais. Il avait l’air à la fois triste et revanchard.
    Oui Imperator ? Demanda Tauriel.
    Sylesvar a bien été bombardée, et on estime pour l’instant les pertes civiles à plusieurs millions de morts, mais nous venons de détruire leur vaisseau amiral !
    Plusieurs millions de morts ! Tauriel faillit tomber à la renverse, mais cet état fut de courte durée. Après les états d’âmes. Son amiral venait de lui signaler plusieurs flottes légères du comptoir allant vers on ne sait où, et potentiellement à portée des Ercanethels.
    Interceptez !
    Nous allons devoir envoyer des Immédiators non modifiés avec, mademoiselle, les Ercanethels ne sont pas assez nombreux.
    Lancez les calculs alors ! Ordonna t’elle, qui ne voulait pas laisser échapper une seule chance de nuire au comptoir.
    C’est fait, les Immediators seront là trop tard. Seuls les Ercanethels peuvent partir. Egalement, ils semblent nous avoir repérés ! Ils viennent de détruire notre sonde. L’amiral devenait de plus en plus inquiet, mais cela fut de courte durée.
    Envoyez en une autre ! Et n’envoyez pas les Ercanethels faire un sacrifice inutile. Mais cela aurait été vain de toute façon, les zétrans se dirigeaient vers l’extérieur du territoire amaranth.
    Les opérations semblaient terminées. La salle n’y croyait pas trop, et la surveillance fut maintenue à son maximum. Mais rien ne vint plus, aussi Tauriel décida de sortir prendre l’air. Une fois plongée dans une nuit fraiche éclairée seulement par les douces lueurs orange d’Arân Thryn, elle se sentit faiblir et se laissa quasiment tomber sur le premier banc qu’elle trouva, ce même banc sur lequel elle s’était endormie trois jours plus tôt. Les jardins impériaux furent un cadre si reposant qu’elle respira sereinement pour la première fois depuis
    Elle ne comprenait pas. Une planète avait été bombardée et des millions d’innocents tués pour une raison qui lui était inconnus, alors même que l’Impérator qui aurait pu être la cible n’y était pas. Elle ne comprenait toujours pas comme elle, qui aurait dut être la cible numéro un, n’était pas prisonnière dans une cale d’un de ces vaisseaux couleur rouilles aussi subtils que leurs créateurs, laissant Harlonduneï fumante derrière elle et devant subir elle ne savait quel sévices de la part d’une enfant impératrice à ses yeux à moitié démente.
    Un de ces quatre, il faudrait faire assassiner cette gamine, elle était trop dangereuse pour tout le monde pour rester au pouvoir. Enfin si cela était possible, personne ne semblait vouloir le faire.
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    Tauriel Féataure
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Mar Déc 29, 2015 3:22 am

  • L’armada avait continué, ravageant plusieurs positions impériales sans rencontrer plus de résistance. Les immenses hangars des Ruches crachaient des flots impressionnants de chasseurs qui noyaient les cibleurs ennemis, les rendant moins efficaces. Mais Jinta n’était pas l’amiral le plus compétent de la flotte du Comptoir. Et Yelena le savait. Lors de l’attaque d’un avant-poste en bordure de territoire, il avait sous-estimé la résistance ennemie et avait envoyé le Cerni en tête. Les croiseurs impériaux n’avaient pas eu raison du blindage démesuré du géant de titane, mais l’un d’eux avait réussi à se caler entre lui et le reste de l’armada et avait utilisé ses canons pour endommager les propulseurs principaux.
    Mais ils avaient quand même réussi à rejoindre le point de rendez-vous. Le corps expéditionnaire était stationné à proximité d’une lune de glace. Il y avait de fortes chances pour que leur position soit connue des impériaux mais Jinta ordonna à Yelena de prendre le contrôle du reste de la flotte et de continuer la mission pendant qu’il resterait là avec le Cerni et qu’il procédait aux réparations. La maitresse de guerre avait longuement protesté. Le Cerni avait beau être lourdement armé, il n’en était pas moins une cible de choix pour leurs ennemis. Et ceux-ci étaient nombreux. Mais elle finit par obéir, elle n’avait aucune raison valable pour le destituer. Elle était donc partie semer la mort dans d’autres régions d’Aelron.
    Il fallut une journée complète de vol pour rejoindre sa cible. Depuis la passerelle de l’Emeri, la femme déployait la flotte. Elle n’était pas habituée à être à bord d’un porteur. Les Ruches étaient lentes et peu maniables. Pire encore, les Ruches n’étaient pas armées. Elle avait l’habitude des Ravageurs et de leur armement de pointe. Mais elle finirait par s’y habituer.
    Passez les escadrons un à quarante-quatre en formation 12-A. Les croiseurs restent en retrait, les pilotes de chasse doivent mériter leur salaire.Sur l’hologramme tactique, elle voyait les ordres être exécutés et les signaux ennemis disparaissaient les uns après les autres. Les impériaux s’étaient défendus comme ils le pouvaient. Mais le rapport de force jouait encore en leur défaveur. Une poignée de minutes après que le dernier astronef de défense fut balayé, une communication en provenance de la planète lui parvenait. Une reddition dans les règles. Elle ne prit pas la peine d’écouter la proposition des impériaux. Elle se leva du siège de commandement, laissant la main à son second.
    Ahir, tu prends le commandement. Envoie-leur nos conditions. Ils ont une heure pour y répondre. Passé ce délai, lance l’assaut terrestre.
    Elle se sentait spécialement de bonne humeur, aussi alla-t-elle au cœur du vaisseau, là où se trouvait l’épurateur d’air. La salle-cœur était sphérique. Le volume était presque entièrement occupé par un maillage dense de végétaux. Yelena ne savait pas ce qui l’avait amené là. Mais elle profitait de l’instant présent. Elle en profita de longues minutes. Cependant, toutes les bonnes choses ont une fin et l’alarme stridente qui résonnait dans ses oreilles la tira de ses pensées.
    Sans attendre, elle fonça jusqu’à la salle de commandement. Une armada d’assaut rapide se dirigeait vers le Cerni. Celui-ci réclamait assistance. Jinta était un idiot. Le croiseur lourd n’était pas capable de fuir, les dégâts sur ses propulseurs étant trop importants pour espérer distancer les vaisseaux d’interceptions ennemis. Yelena aurait pu envoyer les Ravageurs et les Ykions prêter main forte au Cerni. Mais si elle faisait cela, elle laissait les Ruches sans escorte. Et elle ne pouvait pas se le permettre. A nouveau assise, elle etablit la communication avec l’amiral.
    Jinta, nous sommes trop loin pour agir à temps. Vous allez devoir vous débrouiller seul.
    L’amiral hurlait. Mais la femme avait déjà coupé la communication. La planète avait capitulé et les soutes se remplissaient du butin. Yelena suivait distraitement les opérations. Son attention était occupée par les simulations du combat du Cerni. Le combat allait être rude sans vitesse. Mais il n’était pas perdu d’avance. Elle repassa encore et encore la scène, modifiant légèrement les paramètres à chaque fois.
    L’amiral Cile Jinta attendait. A l’intérieur et à l’extérieur du croiseur lourd, des centaines d’ingénieurs et de techniciens s’affairaient pour remettre en état le vaisseau. L’homme regardait l’écran de contrôle et constatait que plusieurs avaries avaient été réparées. Cela le ramena plusieurs années en arrière.

    Le jeune capitaine de frégate pestait. Autour de lui, son vaisseau tombait en ruine. Sur les quarante-quatre membres d’équipage du Sarti, seuls cinq étaient encore en vie. Belor était mort et l’amiral Alta avait prêté allégeance à l’impératrice fraîchement couronnée. Mais le gouverneur de Rok ne l’avait pas fait. Et son influence sur la flotte de défense coloniale était grande. Le combat qui devait être gagné d’avance avait viré au carnage. Le vaisseau amiral avait explosé dans les premières minutes du conflit. La corvette avait été gravement endommagée. Elle ne pouvait quasiment plus bouger et le trois quart de ses armes avaient été détruites. Jinta était assis sur le fauteuil de commandement, se tenant la tête. Il ne restait qu’une poignée de vaisseaux loyalistes en état de se battre. Et bientôt, les canons des dissidents se tourneraient vers le Sarti et l’atomiserait, envoyant ses occupants flotter à l’état de particules.
    Quels sont les ordres ? Le lieutenant Mikr, le second attendait debout, hurlant presque pour être entendu par-delà les alarmes. Capitaine, il faut agir vite ! Mais Jinta n’écoutait pas. Il n’entendait pas son second. Il n’entendait pas plus les alarmes. Il était en état de choc. Mikr le vit et prit le commandement. Il ordonna à l’officier radio, seule autre personne sur le pont avec eux de faire venir les survivants. Puis une fois que ce fut fait, d’activer les purificateurs d’urgences et de couper tous les systèmes actifs du vaisseau. Il espérait que les vaisseaux ennemis ne scanneraient pas trop en détail l’épave.
    Le groupe resta ainsi pendant huit jours sans rien faire. En plus du capitaine de frégate, du lieutenant et de l’opérateur radio, il y avait le médecin de bord et l’artilleur bâbord. Jinta avait retrouvé son calme. Mais il n’avait pas repris le commandement. De toute façon, il n’y avait rien à commander. Ils avaient assez d’air pour tenir encore un bon mois. Et le vaisseau contenait assez de vivre pour tenir toute une vie. Mais ils ne pouvaient déplacer le vaisseau. Ils ne pouvaient qu’attendre. Attendre et écouter. Le lieutenant avait eu l’idée d’activer le récepteur d’une des combinaisons de combat. Ils entendaient donc toutes les transmissions en provenance de la flotte et de la planète. Les nouvelles étaient encourageantes. L’impératrice avait envoyé des renforts. Ils allaient reprendre la planète et les secourir.
    Mais c’est là qu’apparurent les premières dissensions. La flotte coloniale comptait attendre la flotte du Comptoir à sa sortie de l’hyperespace. Mirk avait alors proposé de prêter main-forte à la flotte. Son plan était simple. Quelques minutes avant son arrivée, ils réactiveraient le vaisseau et tireraient avec le canon et les six silos de missiles restants sur la défense. Avec un peu de chance, ils rompraient leur formation et seraient pris au dépourvu à la sortie des forces du Comptoir. Mais le plan ne faisait pas l’unanimité. Jinta émit plusieurs objections, soutenu par le médic. Il soutenait qu’ils devaient continuer à faire le mort jusqu’à ce que la bataille commence et tenter de fuir si celle-ci ne tournait pas en leur faveur.
    L’arrivée était imminente. Jinta pensait que Mirk avait abandonné son plan. Mais le lieutenant était tenace. Par surprise, Mirk lança une mutinerie. Avant que le capitaine ait le temps de réagir, l’artilleur le ceinturait. En moins d’une minute, il fut ligoté à côté du médecin. Puis les trois mutins pressurisèrent le vaisseau et activèrent l’armement. Le lieutenant s’assit à la place du capitaine tandis que ses deux compères partirent contrôler les armes. Les senseurs indiquaient onze minutes avant l’arrivée de la flotte. Il était temps d’agir.
    Cile Jinta revint à la réalité. Il n’était pas du genre à se remémorer le passé. Mais la flotte qui approchait risquait fort de l’envoyer rejoindre son créateur, si tant est qu’il y en ait un. Il consulta à nouveau les écrans de contrôle qui lui indiquèrent que les bâtiments ennemis fonçaient toujours droit sur eux.
    Il ne voulait pas mourir. Il ne voulait vraiment pas mourir. Mirk semblait absorbé par les écrans de contrôle. Le futur amiral en profita pour se relever et attraper l’arme fixée au mur. La détonation résonna pendant un long moment dans l’espace confiné. Attrapant le couteau à sa cheville, il se défit de ses entraves. Il poussa le corps encore chaud de son second et s’affaira à désactiver le vaisseau. Malheureusement, il n’en eu pas le temps. A peine assis, le canon cracha sa masse de titane. Une poignée de secondes après, les rampes de missiles lâchèrent leur salve. Les projectiles n’avaient pas encore parcourus la moitié de la distance quand la seconde salve partit.
    L’effet de surprise fut total. Le Selephon, troisième bâtiment de la flotte coloniale en tonnage n’eut pas le temps de pivoter pour se protéger de son blindage. Le projectile de plasma traversa une dizaine de ponts à une cinquantaine de mètres du générateur. Les contre-mesures, tirés depuis la proue ne purent détourner le dernier missile qi s’engouffra dans la brèche. La tête nucléaire se fragmenta puis détonna. Une dizaine de seconde plus tard, le vaisseau se disloqua. Son générateur en surcharge explosa, projetant les restes du Selephon contre les vaisseaux à proximité.
    Le plan avait fonctionné à la perfection. La formation se rompit et des intercepteurs activèrent leurs propulseurs à vitesse de combat, les poussant au-delà de leur fonctionnement normal. Jinta poussa les propulseurs à son tour en hurlant aux artilleurs de continuer à tirer. Ils n’avaient aucune chance d’échapper à leurs poursuivants. Mais l’heure n’était plus à la réflexion.
    L’intelligence artificielle du vaisseau n’arrêtait pas d’annoncer de nouveaux missiles en approche. Dans moins d’une minute, le vaisseau serait oblitéré. Mais le destin en avait décidé autrement. Les vaisseaux du Comptoir apparurent, emplissant le radar de leur écho. L’armada encerclait complètement les défenseurs. Sans attendre, les IA lancèrent des missiles d’interception. Le Sarti était sauvé. Les missiles changèrent de trajectoire pour accrocher des cibles plus importantes et beaucoup furent arrêtés par les contre-mesures. Le capitaine activa immédiatement les communications pour prévenir de son allégeance.
    Jinta s’affala sur le fauteuil. Il resta là sans bouger pendant de longues minutes. Sur l’hologramme tactique, il suivait le déroulement du combat. Les assaillants, largement supérieurs en nombre détruisaient les vaisseaux ennemis les uns après les autres avec une facilité déconcertante. Alors qu’il ne restait qu’un seul signal hostile sur l’affichage, l’amiral en devenir se leva en sursaut. Il venait de se rendre compte qu’il finirait en cours martiale pour ses actes. Et il doutait que son ange-gardien le protège indéfiniment. Il ramassa l’arme qu’il avait fait tomber. Il la regarda quelques secondes, se demandant s’il faisait bien. Mais ses scrupules disparurent alors qu’il pressait la détente, logeant une balle dans la tête du médecin. Sans attendre, il se dirigea vers une console. Celle-ci fonctionnait mal mais la fonction qu’il voulait répondait toujours. Quand il valida, les cloisons de sécurité de chaque section se verrouillèrent. Il lâcha la console et inséra sa clé de sécurité dans le fauteuil de commandement. L’intelligence artificielle lui demanda de confirmer son ordre.
    Enfiler la combinaison lui prit plus de temps que prévu. L’IA avait demandé si elle devait déverrouiller toutes les cloisons mais le capitaine avait refusé, se contentant d’ordonner d’ouvrir sur son passage. Il se propulsa dans le vide alors que la voix numérique égrenait les secondes. D’une pression de la main, il activa son propulseur dorsal pour s’éloigner encore plus de la corvette. La voix avait passé le cap des trente secondes quand il envoya un SOS sur la fréquence générale. Puis l’espace s’emplit d’une lumière aveuglante. Et il s’évanouit quand il fut frappé par un débris.

    Il avait menti. Il n’avait cessé de mentir depuis ce jour. Son « acte héroïque » avait été récompensé. Le seul survivant du Sirta avait gravi les échelons plus vite qu’il n’avait osé l’imaginer. Il était devenu amiral sans avoir à participer à nouveau à une bataille sérieuse. Et maintenant, il risquait sa vie à des milliers d’années-lumière de chez lui. Il commandait le Certi, il y avait une chance pour qu’il survive. Mais une voix dans sa tête lui disait que son heure était venue. Et cette voix n’était autre que celle de Mirk. Jinta fit alors ce qu’il n’avait jamais fait de sa vie, il se comporta comme un soldat.
    A l’équipage du Certi, aujourd’hui, nous allons affronter un ennemi et il y a de fortes chances pour que cet ennemi ait raison de nous. Mais laissez-moi vous dire une chose, si nous devons mourir, nous emporterons tous ceux que nous pourrons. Nous sommes fiers ! Nous sommes puissants ! Nous sommes l’élite ! Nous sommes les Zétrans ! Espen nous regarde, ne la décevons pas. Amiral Cile Jinta, terminé
    Les personnes présentes dans la salle de commandement applaudirent. Le vaisseau n’était pas prêt au combat, mais son équipage l’était. Et il entraînerait autant d’impériaux que possible.

    Les impériaux n’avaient pas fait dans la dentelle. Plusieurs centaines de croiseurs rapides sortirent de l’hyperespace en formation. Le croiseur lourd les attendait. Les batteries laser et plasma crachèrent sans discontinuer alors qu’une nuée de chasseurs lourds amaranth sortait des hangars et fonçaient à toute vitesse sur leur cible. L’amiral hurla de rage. Le Certi était conçu pour combattre les flottes de croiseurs. Il n’était pas équipé pour combattre une telle quantité de chasseurs. Les chances de survivre à l’affrontement venaient de disparaître. Mais Jinta ne céda pas à la panique. Il était déjà mort. Il réactiva les propulseurs principaux et les poussa au maximum. L’IA répéta en boucle que le générateur était en surchauffe. Mais l’amiral n’en avait cure. Il fonçait droit sur les croiseurs ennemis. L’armement était entièrement dirigé vers l’armada ennemie et ignorait les chasseurs. Le Certi fit pleuvoir le déluge sur les croiseurs amaranths. Il n’en restait plus aucun quand les chasseurs lourds le criblèrent de torpilles, le faisant exploser. Le Premier Corps Expéditionnaire du Comptoir venait de perdre son vaisseau amiral.
    Viens donc danser,
    La valse des couteaux,
    La valse des canons!
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